Vingt ans après les travaux de reconnexion de la Réserve Naturelle Nationale de l’Etang de Cousseau et suite à la mise en place en 2016 des passes à poissons, les inventaires menés en 2018 par la Fédération pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique montre une évolution du peuplement piscicole plutôt positive, mais son équilibre reste fragile. En effet les suivis montrent la présence :
- d’espèces exogènes bien implantées (comme l’écrevisse de Louisiane) ou nouvellement apparues qui peuvent impacter le cycle biologique de certaines espèces comme le brochet,
- de poissons caractéristiques de milieux plus eutrophes témoins de milieux qui s’enrichissent et moins favorables aux espèces caractéristiques de ces milieux (brochet, perche…).
Il conviendra donc de continuer à surveiller ces évolutions.

DES INVENTAIRES COMPLETS DES PEUPLEMENTS PISCICOLE ET ASTACICOLE
Un suivi piscicole complet a été mené par la Fédération en 2018 afin de dresser un bilan exhaustif de l’état du peuplement et des circulations de poissons 20 ans après les travaux de reconnexion de la Réserve avec le canal des étangs et suite à la mise en place en 2016 de passes à poissons à l’entrée des canaux d’entrée et de sortie. Il comprend :
- le suivi de la passe à poissons en entrée de la réserve,
- l’inventaire piscicole dans le marais,
- l’inventaire piscicole de l’étang et des canaux,
- et le suivi de la qualité de l’étang avec une analyse du phytoplancton et de la physico-chimie.
Une étude sur les populations d’écrevisses exotiques a également été lancé depuis 2017 sur la réserve par la Fédération. L’écrevisse de Louisiane est observée depuis les années 2000 sur ce territoire mais aucun suivi spécifique n’avait jamais été réalisé. Le gestionnaire de la Réserve souhaitait améliorer les connaissances sur cette espèce nuisible envahissante qui provoque de nombreux dégâts sur les milieux aquatiques et la biodiversité.
Six stations différentes selon les habitats (2 mares, 2 canaux, l’étang et le marais), font chaque année l’objet d’un piégeage d’écrevisses à l’aide de nasses (4 nasses par station ; une pose de 24h en mai, juin, septembre et novembre). L’objectif de cette étude est de suivre les populations d’écrevisses de Louisiane au cours de leur période d’activité. Plus précisément ce suivi permet la mise en évidence des périodes de reproduction de l’espèce et les facteurs influençant leur cycle de vie selon les saisons, les secteurs colonisés sur la Réserve et les différents stades de développement.
UNE EVOLUTION GLOBALEMENT POSITIVE DU PEUPLEMENT PISCICOLE
Depuis les premiers inventaires conduits par le CEMAGREF en 1979, 1980, 1981 et 1998, avant la reconnexion, jusqu’aux suivis réalisés par la Fédération en 2008 et 2018 (après reconnexion), nous disposons de 40 années de données sur les espèces piscicoles.
Ce suivi sur le long terme a montré une évolution positive du milieu. Cette amélioration est certainement à mettre en lien avec la reconnexion hydraulique et l’optimisation de la gestion des niveaux d’eau après 1999 ainsi qu’à la mise en place des passes à poissons à l’entrée et à l’exutoire des canaux de la réserve en 2016.
Les principales observations favorables sont :
- Une amélioration ou une constance de la diversité en poissons de l’ensembles des sites.
- Une diminution de la présence des espèces piscicoles exogènes (notamment le poisson chat) dans l’ensemble des compartiments biologiques.
- Un équilibre entre la biomasse en individus carnassiers et du poisson fourrage depuis 2008.
- Une structure en taille plus équilibrée pour les espèces repères (comme l’anguille et le brochet) et celles qui sont fortement représentées sur l’étang (gardon et perche notamment).
- Une colonisation de nouvelles espèces et une forte proportion de cyprinidés entrant dans la réserve (carpe, goujon, tanche) qui constitue un stock de poisson fourrage important nécessaire à la chaine trophique de la réserve.
Avec les 17 espèces inventoriées et le dénombrement de plus de 6 000 poissons, la passe à poissons au niveau de l’exutoire du canal d’évacuation semble être efficace et constitue l’une des portes d’entrée des espèces piscicoles au sein de la réserve. En revanche, la hauteur d’eau et la vitesse du courant dans la passe sont deux paramètres pouvant limiter par moment la franchissabilité de l’anguille et du brochet.


- Une amélioration des paramètres comme la température et l’oxygène de l’eau sur l’étang qui sont classés en bon état en 2008 et 2018.
Globalement, la variété des milieux présents dans le territoire de la réserve est un atout pour la faune piscicole. En effet, bien que les canaux soient les milieux les moins peuplés et les moins diversifiés, ils constituent des zones de transition pour l’ensemble du cortège piscicole de l’étang et du marais. Ces deux derniers milieux sont complémentaires pour l’équilibre piscicole du milieu. D’un côté, le marais sert de refuge pour les jeunes stades de poissons qui peuvent assurer leur croissance à l’abris des prédateurs mais il constitue également une zone nourricière importante pour les espèces. Il permet également aux géniteurs de se reproduire. L’étang à l’inverse permet aux individus adultes de se développer. Enfin l’ensemble de ces milieux participe au maintien d’un peuplement de poissons de qualité et équilibré pour les lacs de Carcans-Hourtin et de Lacanau (zone de reproduction naturelle pour les poissons blancs et carnassiers des lacs).
MAIS L’APPARITION DE NOUVELLES ESPÈCES PISCICOLES EXOGÈNES…
Cependant des évolutions moins favorables sont également constatées avec :
- Une apparition de nouvelles espèces piscicoles exogènes : la gambusie, l’ide mélanote, la grémille et le silure glane.


- Un recul de l’ablette et du brochet comparativement à la perche et au sandre.
- Sur l’étang, une qualité du phytoplancton moyenne et un milieu riche en éléments nutritifs (état eutrophe) d’après la transparence et le taux de chlorophylle A. A mettre en lien avec la plus forte présence en 2018 du sandre et des deux espèces de brèmes sur l’étang mais également une capture totale en poissons qui augmentent indiquant une plus forte productivité du milieu.
EN DEUX ANS PLUS DE 1400 ÉCREVISSES DE LOUISIANE CAPTURÉES
Le suivi mené en 2017 et 2018 a permis de mettre en évidence plusieurs éléments sur la population d’écrevisses de Louisiane présente sur la Réserve :
- Plus de 1400 écrevisses capturées, mesurées et sexées soit 18 kg en deux ans
- Les effectifs capturés en 2018 (10 écrevisses par engin/24h) sont presque deux fois moins importants qu’en 2017 (6 écrevisses par engin/24h) mais les biomasses sont quasiment équivalentes. Les écrevisses capturées ont un poids plus élevé et sont probablement plus âgées.
- L’activité des écrevisses est plus importante entre mai et septembre chaque année, lorsque les températures sont plus élevées.
- Très peu de juvéniles ont été capturés, mais il semble qu’ils privilégient la station située sur le marais où la végétation est plus dense.
- Au moins 2 générations d’écrevisses sont produites chaque année sur la Réserve, soit une première période de reproduction à l’automne (septembre-octobre 2017) et une deuxième période au printemps (mars-mai 2018).


LA RÉSERVE SERA TOUJOURS SOUS SURVEILLANCE
En termes de perspectives, il est prévu de réaliser :
- La poursuite de suivi des populations d’écrevisses exotiques en 2019.
- Une nouvelle étude bathymétrique de l’étang d’ici 5 à 10 ans, à l’aide du même protocole et d’outils calibrés de manière identique à 2018, pour suivre l’évolution de la hauteur de sédiment (comblement).
- Un suivi de la trophie du plan d’eau en corrélation avec la surveillance de l’évolution du peuplement piscicole réalisé tous les 10 ans.
- Un suivi de la présence des nouvelles espèces exogènes observées dans la Réserve et de celles déjà implantées.
- Selon les résultats du suivi de la passe à poisson poursuivi début 2018, d’optimiser au besoin la gestion hydraulique de la passe.




